Jeune entrepreneure congolaise, fondatrice de House of Irico, Iris Nzolantima s’est confié exclusivement à KINSHASATIMES.CD sur sa campagne visant à faciliter l’accès aux serviettes hygiéniques aux filles démunies.

KINSHASA TIMES.CD : vous avez initié récemment la campagne « BRISONS LE SILENCE, PARLONS MENSTRUES » dont le slogan est « une serviette hygiénique gratuite pour chaque femme ». Qu’est-ce qui a motivé cette ambitieuse initiative ?

Iris Nzolantima : «il n’y a des richesses que d’Hommes » dixit le Président Joseph Kabila lors de son discours sur l’éducation en 2011. Le terrain était vide. Personne n’y avait pensé en République Démocratique du Congo. J’ai non seulement saisi l’opportunité de débuter, mais également celle d’apprendre des communautés visées par ce projet. Pour être honnête, j’ai fait face à cet accès limité aux serviettes hygiéniques pendant mes années universitaires en Afrique du Sud, c’est ce qui a suscité en moi la volonté d’entreprendre ce projet.

KT : Le thème de la campagne fait partie des questions taboues en RDC. Quels défis rencontrez-vous?

IN :Les défis rencontrés sont énormes, notamment le refus de communiquer sur ce sujet qui reste tabou dans notre société, la crainte de ce que les autres peuvent penser de votre engagement, l’inaccessibilité aux financements pour notre stock de distribution, l’insuffisance des personnes volontaires formées pour l’expansion de ce projet. Mais malgré tout, Nous continuons la sensibilisation pour faire connaître et comprendre à la population ce qu’est l’hygiène menstruelle.

KT : Quelles sont les catégories de femmes que la campagne vise, vu qu’il y a certainement des femmes qui n’ont pas besoin de gratuité pour se prendre en charge ?

IR : Nous visons les jeunes filles démunies, de 10 à 25 ans. Ces filles et femmes vivant dans les communautés périurbaines et rurales de la RDC.

KT : Votre campagne veut doter chaque congolaise d’une serviette hygiénique gratuite. Cela va certainement perturber les affaires de beaucoup d’opérateurs économiques qui vendent les serviettes.

IR : Non ! Puisque nous nous sommes lancés aussi dans la vente de ces produits. Nous ne supprimons ni ne réduisons sa commercialisation. La gratuité existe pour les préservatifs, mais il existe toujours des préservatifs commercialisés. Par gratuité, nous avons voulu transmettre le message de l’accessibilité. Les serviettes hygiéniques restent inaccessibles à une grande partie des femmes en RDC faute des moyens.

KT : Comment pensez-vous arriver à assurer la gratuité de ces serviettes ?

IN : Pour l’instant, nous fonctionnons en grande partie sur fonds propres. Nous recevons aussi quelques donations de personnes touchées par notre démarche. Nous avons près de 400 filles à ce jour qui reçoivent les serviettes hygiéniques sur une base mensuelle. Actuellement, nous sommes en rupture de stock et nous avons suspendu la distribution jusqu’au ravitaillement.

KT : Quel est votre rêve par rapport aux femmes de la RDC ?

IR : Notre rêve est de déclencher une génération de femmes fortes, confiantes, instruites et autonomes. De donner la possibilité à chaque femme de se gérer elle-même et de savoir que dans le monde, l’accès aux serviettes hygiéniques est devenu possible pour chaque fille et femme.